Embrunman 2018 : Round 2

« Faire un marathon, c’est de l’inconscience, faire un 2ème marathon c’est du courage. Faire l’Embrunman, c’est de l’insconcience, refaire l’Embrunman, bah ça reste de l’insconcience ! »

Chaque année l’EmbrunMan revient très précisément le 15 août et chaque année, il est toujours aussi dur pour nous. Par contre, il y a une personne pour qui, cette 35ième édition a été beaucoup plus compliquée… C’est pour l’organisateur, Monsieur IACONO. Rien ne lui aura été épargné cette année, il réalisait l’exploit d’organiser en une année ce magnifique triathlon mais cette année disons le tout net, il a réalisé l’impossible en organisant ce triathlon en à peine 4 mois, c’est le Tom Cruise du Triathlon ! Je tiens donc en priorité à rendre un immense remerciement à ce Monsieur sans qui tout ce que je vais raconter par la suite n’aurait jamais eu lieu. Il y a tellement de gens qui parlent sans jamais rien faire et bah, lui, il le fait ! Monsieur IACONO, un grand Monsieur du triathlon, un grand Monsieur du sport Français, un grand Monsieur tout cours. Bravo à lui et à toutes ses équipes, natation, vélo et CAP, aux bénévoles, gendarmes, secouristes et médecins qui ont fait que cette édition soit tout simplement comme les autres… PARFAITE !

9 mois d’entraînement et nous y sommes avec Vince, notre 2ième Embrunman. Nous somme prêts, bonnet blanc floqué « Embrunman » sur la tête, nous nous élançons dans le noir complet dans le lac de Serre-Ponçon, seulement guidé par un type sur un canoë muni d’une lanterne rouge. Mes 2 tours de Nat’ se passent plutôt bien, je tiens bien la corde et ne suis pas fatigué. Je rentre dans le parc à vélo et Vince est déjà loin, lui le super nageur. Je mets mes fringues de vélo et cours le long du tapis bleu, sort du parc à vélo et voit les autres enfourcher leur monture. MERDE, j’ai oublié mon vélo, je fais demi-tour pour le récupérer mais je suis bloqué par un arbitre… « Vous ne pouvez pas rentrer dans le parc à vélo Monsieur ! ». Quoi mais vous déconnez ! J’ai oublié mon vélo. Mais l’arbitre est intraitable, toute personne qui sort du parc à vélo, ne peux plus ré-entrer. Je discute avec l’arbitre, tente de négocier mais rien n’y fait, il ne veut pas me laisser entrer. Je lui dis : « Vous voulez quand même pas que je fasse les 188 bornes à pied ?» et là, il s’écarte laissant apparaître une dizaine de Camelbacks derrière lui et me dit « Si vous voulez, y a des Camelbacks ici » mais c’est pas possible, je ne suis pas venu faire un trail, je suis venu faire un triathlon que je lui dis, j’ai besoin de mon vélo ! En plus je lui explique que je ne peux pas courir avec mes chaussures de vélo, mes cales vont me gêner ! En plein milieu de la discussion avec cet arbitre, j’entends BRING, BRING, BRING, 3h30 du mat’, le réveil sonne, j’ai fini mon 25ième EmbrunMan Virtuel et je vais attaquer mon 2ième EmbrunMan bien réel celui là !

Départ et Natation

J’arrive donc au parc à vélo un peu après Vince. On est par club dans le parc donc je suis à côté de lui. Le psychopathe du rangement, il vérifie 15 fois les mêmes trucs, jette un coup d’œil sur ma caisse et me dit « t’as pas de sac course à pied ? », bah, non « quoi mais t’es fou !? Ils prévoient de l’orage en fin de journée, faut que tu mettes des chaussettes sèches et blahblahblah… », Je ne vous ai pas dit mais cette année en plus de la traditionnelle caisse, on a le droit de mettre un sac CAP sur le parcours. Sur ses conseils, je dérange mon bordel organisé dans ma caisse… Bon, j’ai 1 paire de chaussettes donc pour le sac CAP c’est mort, je lui dis et en même temps que je lui dis ça, je mets mon unique paire de chaussettes dans ce foutu sac, la connerie ! Vous le comprendrez plus tard. Le père Vince est un peu tendu quand même, il me dit « mais tu mets ta tenue de vélo sous ta combi ? » et oui, c’est ma technique, Christophe peut bien nous faire chier avec l’assiette horizontale du nageur, moi j’ai trouvé la technique, peau de Chamois quadruple épaisseur sous la combi et j’ai le cul qui sort de l’eau ! Ecoute Tuco, y a 2 catégories de triathlètes, ceux qui ont une peau de Chamois quadruple épaisseur au cul et ceux qui font la planche… toi, tu fais la planche... Non seulement cette anecdote est vraie mais en plus, elle a le mérite de décrisper le bestiau… Corne de Brume, les féminines s’élancent, il est temps de se rapprocher de la ligne de départ pour nous. Cette année on se place au milieu du peloton pour ne pas être trop gênés au départ. Une arbitre passe dans les rangs et « conseil » de mettre les lunettes de nat’ sous le bonnet, je me marre intérieurement, encore des mecs qui savent pas où ils ont mis les pieds ! Notre stratégie Natation, avec Vince, étant complètement différente et en plus s’élançant dans le noir, on fait chacun sa course comme on dit. On se motive l’un l’autre et c’est parti corne de brune, footing sur 10m et à la flotte ! Je galère un peu pour voir cette fameuse lanterne rouge avec les geysers devant moi mais cela ne dure que 20’, le jour se lève ensuite. Fidèle à ma technique, je prends au plus court, à la corde, ça bagarre forcément, une seule trajectoire idéale en lac et beaucoup veulent la prendre… J’ai progressé dans le domaine par rapport à l’année dernière, avant je virais les autres en arrêtant de nager, cette année je vire les autres tout en continuant à nager, la Masse Start c’est vraiment mon truc, je m’éclate comme un gamin au milieu de ce bordel… La nat’ pour moi, c’est du réveil musculaire, je nage à l’économie sans battre des jambes et je m’applique sur mes appuis, ça suffira bien comme ça. Je sors nickel de l’eau en moins d’1h10 et retrouve le père Vince qui comment dire, à quand même un petit rictus de surprise genre « t’est déjà là!?», pas de compet’ entre nous, l’objectif étant d’être finisher, on s’encourage l’un et l’autre pour la suite du tri. Je m’élance derrière Vince avec 1 min de retard sans oublier mon vélo pour le coup !

Partie vélo

Pour l’évenement, j’ai acheté un maillot « technique » de vélo M&M’s. Sur les conseils de Jean Marc LIBERT, le Boss d’Embrun, je pars avec un seul bidon (le 1er ravito étant très proche inutile de se trimballer 2 bidons dans la côte du départ) et le développement que je vais utiliser dans la côte de Reallon, la chaîne étant froide pour avoir passé la nuit dehors (on met les vélos la veille), si on peut éviter de la pêter au départ en changeant de développement en prise, c’est mieux ! Et c’est parti, un petit coucou à nos supporters Jean Marc et Marie Christine et c’est parti pour une belle aventure en vélo. Je vois tout de suite que mon capteur de puissance n’a pas aimé coucher dehors, autant vous le dire il déconne complètement, dommage, j’aurai bien aimé contrôler la qualité de mon pédalage en live et voir combien de Watt je sors en débrief de course (penser à mettre une housse de vélo la prochaine fois… comme les pros !). Pas grave, le cardio fonctionne, ce serra Zone 2. Comme l’année dernière, je suis vachement haut dans mes puls’ dans cette côte, zone 3, mais contrairement à l’année dernière, je ne panique pas et je ne ralenti pas. Je gère plus au feeling cette côte qu’au cardio. Sur le vélo, je suis très scolaire, un timer « pense à boire connard » toutes les 10min, « Miam Miam » toutes les 30min et nouveauté de cette année « si t’as pas fini ton bidon t’es un bidon ! » toutes les heures. Je ne suis pas un grimpeur donc je me fais bien doubler dans cette 1er difficulté mais je m’en fou, car vous savez quoi, l’Embrunman ne commence qu’à la 3ème boucle du marathon… 1er heure, 2 bidons pour compenser la déshydratation en nat’, truc que j’avais pas fais l’année dernière… C’est qu’on transpire dans la flotte. Là, c’est top, un œil sur le compteur et un œil sur le paysage, c’est magnifique. Ayant dégueulé sur la dernière boucle l’année dernière, j’ai mis en place un « food plan ». Que du solide jusqu’en bas à Briançon et j’attaque les gels après, sur le papier, ça semble pas mal. 1h30 de course et enfin mon cardio redescend en zone 2, on est bien. Je profite du paysage. Virage serré à gauche et j’attaque l’Izoard que je connais par cœur maintenant, j’en chie après Arvieux, normal et j’en re-chie après Casse Désert, re-normal, no stress, t’es pas un grimpeur, c’est pas là que t’es doué, au cardio, je mange mon pain noir mais je suis super bien, à mon rythme, je me fais donc énormément ramarrer dans ce col, mais l’EmbrunMan ne commence qu’à la 3ème boucle du marathon, je vous dis. Un type me demande si c’est moi qui tient le ravito M&M’s, nan, j’ai des Bretzels dans ma poche arrière mais pas de M&M’s, oui autre nouveauté par rapport à l’année dernière où je n’avais mangé que du sucré, j’alterne salé/sucré donc Bretzel et patates douces avec du gros sel à l’intérieur (conseil de Jean Marc) côté salé, barres énergétiques puis gels côté sucré, en mode « food bike ». Fin du col et petite collation à 12h05, c’est pas beau, donc sandwich poulet/Tome de savoie, paquet de chips, un coca, 5’ de pause, faut pas déconner. Le temps d’enfiler un coupe vent et c’est parti pour la descente vers Briançon. Le passage sur gros plateau, le froid au sommet et l’arrêt au stand, mes cuisses n’ont pas aimé, coup de pédale à droite, crampe à la cuisse droite, coup de pédale à gauche, crampe à la cuisse gauche. 1er pépin physique, bon réfléchie et ne panique pas, je me dis dans la descente, de toute façon les muscles en vélo et en CAP ne sont pas les mêmes donc gère tes crampes sur le vélo, tu ne les auras pas en CAP, on se rassure comme on peu ! Ravito suivant, je vire mes 2 bidons et prends 2 bidons de Saint Yorre et bouffe 2 patates douces salées, priorité sur cette heure de vélo, faire le plein de sel pour virer ces crampes et ça marche ! J’attaque une portion qui m’est plus favorable, plat avec du vent dans la tronche. 1er moment réellement d’euphorie sur la course parce que je double. Mon expérience de l’année dernière me fait savoir que la gestion des moments d’euphorie est aussi important que les moments « BAD ». Profites que tout va bien, de toute façon ça va pas durer. Donc impeccable, je profite de mes aptitudes de rouleurs pour augmenter ma moyenne tout en faisant gaffe de bien rester en zone 2 même si j’ai envie d’en mettre plus. Pallon arrive, je la digère plutôt bien à mon rythme, pour le coup maintenant, j’ai une Fréquence Cardiaque stable en zone 2, mon corps à trouvé son rythme de croisière et j’apprécie les paysages. En cette fin de vélo, je ne me fais plus doubler, j’ai même tendance à commencer à ramasser les morts. A PK150, je vais pour doubler encore un triathlète et je me rends compte que c’est Vince ?! Surpris, je lui dis « mais qu’est ce que tu fou là ? » et là il me répond « je suis épuisé », puré ça sent pas bon, sachant que l’Embrunman ne commence qu’à la 3ème boucle du marathon, je le sens mal. Bon, pas de panique, je lui dis « oublie le chrono, sois Finisher » et je continue, je fais ma course. Quand un mec explose, sur une course comme ça, on ne peut pas s’attendre, je dois rester dans mon rythme. Arrive Chalvet et la dernière difficulté vélo du jour. On croise les cadors du triathlon qui sont déjà en train de courir leur marathon, et tout en doublant des mecs, je leur dis «à cet endroit, faut être fort mentalement les mecs ! » et l’un d’entre eux avec beaucoup d’humour me réponds « tu m’étonnes que faut être fort mentalement… on est juste en train de se faire doubler par un mec qui porte un maillot M&M’s». Mort de rire, j’attaque Chalvet, bon heureusement, je la connais par cœur, par rapport à l’année dernière ou je n’en voyais pas le bout, cette fois, je me projette déjà dans ma CAP dans cette côte. Descente foireuse avec pour priorité ne pas se casser la gueule dans ces virages plein de graviers et j’arrive au parc à vélo… les gambettes ne sont pas mal pour 8h25 de vélo…

Transition 2

A peine arrivé dans l’air de transition, 2 masseurs me demandent si je souhaite un massage, tu m’étonnes que je souhaite un massage, je ne suis pas un pro, T2 c’est 10’ faut pas déconner, j’entends que le 1er arrive, le mec a fini son marathon et moi je ne l’ai pas commencé, no stress. Comme l’année dernière, ils veulent me masser les quadriceps mais moi mon plaisir c’est le massage sous la voute plantaire pour la réactiver complètement flinguée par un seul appuie sur les pédales. Il me retire mes chaussettes, pas grave, elles sont mouillées, j’en ai d’autre dans ma caisse. Les kinés me disent que je suis pas mal, j’imagine qu’ils doivent dire ça à tout le monde, je ne suis pas dupe. Massage terminé, je vais pour mettre mes chaussettes, purée pas de chaussettes et là je me dis MERDE, je les ai mis dans le sac CAP, obligé de remettre mes chaussettes mouillées. Cette micro-connerie du départ va me couter cher, je vais avoir plein d’ampoules alors que j’en ai normalement jamais ! Le père Vince, je l’aurai tué, tiens bah justement quand on parle du loup, le voilà qui se pointe au moment ou j’attaque ma CAP. Je prends un peu de temps pour lui demander comment ça va, mais il a sa tête des mauvais jours, je crains le pire, en partant, je lui dis « FINISHER, y a que ça qui compte ! », il m’avouera à la fin de la course (enfin le lendemain) qu’il avait pris la décision d’abandonner à Pallon mais qu’il ne l’a pas fait en me voyant repartir en CAP. Cette année, j’ai pas oublié de remettre mon porte dossard comme l’année dernière et me présente relativement fringuant devant l’arbitre de sortie de parc et c’est partie pour 42 bornes de CAP, j’essaye de zapper tout ce que j’ai fais, la nat’ et le vélo. Comme d’hab’, la mise en route est compliquée, tes jambes veulent continuer à pédaler et toi tu veux qu’elles courent, y a conflit mais faut pas céder… Le problème, encore un, c’est que la partie difficile de la CAP arrive assez vite, toute la portion sur les berges de la Durance, je ne suis pas encore en mode CAP mais c’est plat donc ça va… Mais puré la côte, là c’est chaud, je ne lâche rien et la monte en courant, j’enchaîne les difficultés, montée dans le centre ville et montée au camping assez péniblement mais je ne panique pas, je suis dans un moment « BAD » mais je sais que l’EmbrunMan ne commence qu’à la 3ème boucle du marathon, donc j’en suis loin. La descente me fait du bien et me fait passer définitivement en mode CAP, il était temps. Je suis de nouveau dans une phase euphorique dans la zone du terrain vague et dans la longue ligne droite de retour mais je gère sans faire excès de zèle, je profite, je sais que ça va pas durer…. Retour au parc à vélo et 1er boucle avalée, je prends un ravito au niveau du parc et me fait masser pendant 3’, principe de précaution au vue de mes crampes sur le vélo et là c’est le drame, je dégueule 50m plus loin…. Aïe, exactement pareil que l’année dernière sauf que ça m’est arrivé à l’entame du 3ème tour, là, je commence mon 2ème tour… Quand on dégueule, c’est mort pour avaler un truc, l’expérience de l’année dernière me laisse penser que je vais plus souffrir en essayant d’avaler un truc qu’en restant à jeun… 2 boucles, 28 bornes à jeun, dans ma tête je me dis, bon, t’as déjà fais le marathon de Berlin à jeun, tu peux le refaire, bon, t’as fini dans la tente des secouristes en Allemagne mais tu l’as fais ! Je suis au fond du trou à ce moment là, j’ai mal au ventre, je suis encore très loin de l’arrivé mais vous savez quoi… je sais que l’Embrunman n’a pas encore commencé, nan ! l’Embrunman ne commence pas à la 2ème boucle, il commence au début de la 3ème boucle. J’arrête de m’alimenter et je ralenti en conséquence. Le fait d’arrêter de m’alimenter m’a finalement été bénéfique car je n’avais plus de douleurs abdominales. En ne buvant rien, en ne bouffant rien je n’avais plus mal au ventre. 2ème passage dans la zone difficile et ces enchaînements de montées. L’année dernière t’as pas marché dans la 2ème boucle, t’as pas le droit de marcher et donc je prends le dessus mentalement et je ne marche pas, je monte la côte avec le virage en épingle, je monte la côte pavée du centre ville et la côte du Camping sans marcher ! Et je redescends, pour le coup la descente me pête bien les jambes, je n’ai plus la force de me retenir dans la descente… je rentre le menton dans le sternum, serre les dents et j’avance sur la portion plate, tout le contraire de ce qu’il faut normalement faire ! Un peu plus loin, je demande à une arbitre combien j’ai fais de bornes, c’est que je suis complètement perdu. Elle me dit vous êtes à 5 bornes du parc, un calcul rapide, 14km pour la 1er boucle plus 5 bornes font 19km et merde, j’ai déjà plus de 2h30 de course je ne m’améliorerai pas en CAP… En fait, je suis trop cramé pour tenir le bon raisonnement, je n’ai pas fait 19 bornes mais 14+(14-5) soit 23 bornes !

J’attaque ma portion favorite, ca va un peu mieux la période « BAD » est finie, mon mental a de nouveau repris le dessus. J’attaque la longue ligne droite et le gars qui tient la sono à la bonne idée de mettre ACDC, puré « ahah bing, bing ahah bing bing ahah THUNDER ! AHAH BING BING AHAH AHAH THUNDERSTRUCK ! » je cale ma foulée sur la rythmique monstrueuse du père Malcom Young et cela me rebooste, heureusement, je ne suis pas tombé sur un solo d’Angus, sinon mes cannes n’auraient pas suivi ! Et c’est parti, je mange cette ligne droite tout en gardant le contrôle pour ne pas basculer dans l’euphorie, l’Embrunman ne commence qu’à la 3ème boucle, jamais ne l’oublier. Passage à gauche de l’arrivée et j’attaque enfin cette 3ème boucle, mon Embrunman peut enfin commencer !

A chaque passage, je me dis : « c’est la dernière fois que tu passes là mon grand », je suis complètement flingué de partout et le moment que j’attends depuis des heures c’est celui qui arrive… L’année dernière au 3ème passage de la zone difficile de la CAP, j’avais marché et je l’avais regretté, NAN tu resteras propre jusqu’au bout, cette année tu NE MARCHERAS PAS, et je cours, je trouve les ressources mentales, je ne sais pas où mais je ne marcherai pas… Comme je suis le seul à courir dans cette côte les autres concurrents qui eux marchent m’encouragent, c’est qu’au passage en restant à courir dans cette 3ème boucle, je ramarre énormément de monde. Et Là, je vais toucher le Nirvana sportif, je cours dans la côte du centre ville, zone pavé et comme je suis le seul à courir, je reçois une ovation du centre ville d’Embrun, du glacier jusqu’à la brasserie, un truc du malade, j’entends des gens dire « Il arrive encore à courir ! », un peu que j’arrive encore à courir. Légère descente et j’attaque la dernière côte, celle du camping, une guirlande de gamins me tendent la main, je fais un écart pour aller les « checker », un geste banal au quotidien, mais qui me coute énormément physiquement mais qui sait peut être que dans 20 ans l’un de ces gamins prendra un dossard à son tour ! Comme d’hab’, l’euphorie va laisser place encore une fois à un trou noir… Dans la descente l’une de mes ampoules située très précisément sous mon petit orteil droit explose, décharge électrique et l’impression de marcher sur un clou, je sers les dents et lâche un « Vince ENCULE », encore et toujours reprendre le dessus mentalement. Je ne veux pas modifier ma foulée pour risquer la blessure, je sers donc les dents à chaque impact de mon pied droit et je continue à avancer. Je double et je double un truc de fou, je retrouve enfin un mec qui court, un peu moins vite, mais le mec court. Je lui dis « Aller on le finit proprement cet Embrunman on court jusqu'à l’arrivée ! » on est côte à côte dans le terrain vague et je fais gaffe à ne pas me tordre la cheville dans cette dernière difficulté. 3 ou 4 impulsions pour franchir le dernier « tape cul » pour reprendre le pont, mon compagnon de lutte lâche prise et marche, moi je continue à courir. Bascule de l’autre côté du pont et la bénévole située à cet emplacement me lance « 4 bornes de ligne droite et t’es arrivé », je regarde mon chrono et ne pige rien, je peux rentrer sous les 5h en CAP, je ne comprends pas trop mais je me dis, tu seras finisher et t’auras pas marché cette année, t’as fais mieux en nat’, t’as fait mieux en vélo, de toute façon, dans ton état tu vas finir au poste de secours alors donne tout pour faire mieux en CAP, laisse tes regrets sur le parcours et j’accélère, mes derniers KM sur la CAP seront les suivants 7’01/km et j’entends au loin le speaker, 6’16/km et ça sent bon les écuries, 6’01/km je bouffe la côte sous le pont, 5’49/km je déboule sur l’arrivée et enfin sur le tapis bleu, là je ralenti parce qu’il faut quand même pas déconner, j’ai le droit de savourer le franchissement de cette ligne d’arrivée ! FINISHER !!!

L'arrivée

La ligne d’arrivée franchie, j’ai à peine le temps d’être félicité par Dam, un mec du club de Fresnes que je tombe à la renverse, juste le temps de me mettre en PLS pour ne pas me faire mal. 28 bornes au mental et là, une fois la ligne d’arrivée franchie, j’ai lâché mentalement et dans ce cas là, le physique s’écroule. On essaye de me donner 4 verres d’eau que je dégueule instantanément. Il me pique le doigt pour me faire une dextro et j’entends le médecin de l’arrivée dire dans le talkie, « j’ai une hypo avec déshydratation minimun stade 2 », il me demande si je peux marcher, désolé mais là je ne peux plus… Vous avez mal au ventre, je me souviens lui avoir dit « je suis trop fatigué pour avoir mal au ventre ! » donc brancard et je suis transféré dans un premier temps dans le poste de secours qui jouxte le parc à vélo. Une poche de NACL dans le bras, le médecin me demande la dernière fois que j’ai pissé, bah juste après Briançon sur le vélo… a quand même ! Il m’explique 2 cas de figure, la personne qui a envie de pisser mais qui pisse des cailloux, ça c’est pas grave, les emmerdements commencent quand la personne n’a plus envie de pisser, ce qui a été mon cas sur toute la CAP et une bonne partie du vélo. La poche de NACL ne change rien, je ne suis toujours pas bien et suis transféré au gymnase en ambulance. Dans l’ambulance, j’entends, « ARRIVEE de VINCENT PAYEN », malgré la fatigue, la perf dans le bras et le brinquebalement de l’ambulance, j’ai un petit sourire aux lèvres, je suis soulagé, il n’a pas déboité car contrairement à l’année dernière je ne l’ai pas vu de la CAP sauf au début et je craignais le pire… Je suis serein, je sais que le doc va s’occuper de moi, je suis entre de bonnes mains, le job est fait pour moi, je suis finisher… Arrivé dans le gymnase, j’ai le droit cette fois si à une poche de Glucose et encore une de NACL, le Doc me dit que je vais rester 2h en observation. Moment d’accalmie au gymnase et on discute, je lui dis « vous savez Doc, je ne suis pas sûr que ça soit bon pour la santé, de faire un truc pareil… » Et là, il m’a dit un truc super « un individu, ce n’est pas qu’un physique, là t’es cramé mais d’ici 1h ça ira beaucoup mieux et dans 48h t’auras oublié, par contre ce que tu as fait mentalement, ça tu le garderas toute ta vie ! Tu veux un massage ? Je t’appelle un kiné pour tes jambes ? » Et il a raison, au moment ou j’écris ces lignes, j’ai déjà récupéré physiquement. Comme, je suis en observation et que je n’ai pas encore la force de sortir du gymnase, une sympathique kiné vient me masser « mais t'es perclus de crampes, me dit-elle, regarde tes cuisses elles tremblent toutes seules, t’as pas mal ? » Puré, mais j’ai même plus la force d’avoir mal ! Elle me masse et quand je lui dis que c’est mon 2ème EmbrunMan, elle se marre, elle me demande pourquoi je l’ai refait… je lui dis « bah j’étais pas sûr la 1ere fois», « pas sûr de quoi ?» me demande-t-elle… « Maintenant, après 2 EmbrunMan, j’en suis sûr, j’ai un corps fait pour jouer à la belote ! » et on rigole. Dernière petite alerte au moment ou je me lève, vertige, qui m’octroie un bonus de 10’ d’observation supplémentaire et je sors de ce gymnase, je repasse par le tapis bleu d’arrivée en recevant de nouveau une ovation « nan, mais c’est bon ça fait 2h que je suis arrivée moi » en tendant ma médaille, j’entends une dame « c’est pas grave, tu l’as bien mérité ». Par respect pour la course, je passe à droite de l’arrivée et rentre dans le parc à vélo, récupérer mes affaires. Les 1er signes de réhydrations apparaissent dans la nuit, j’irai pisser, signe que ça va mieux selon le Doc et ne retrouverai l’appétit que le lendemain matin où j’ai bouffé un chevreuil.

De retour d’Embrun, après 5h de bagnole, le hasard de la Playlist balance Thunderstruck d’ACDC et cela me procure un sourire jusqu’aux oreilles et une larme à l’œil. Pour moi, cette chanson sera toujours associée à l’EmbrunMan maintenant !

J’oubli pas Jojo et Fred (Noisytri) qui ont découvert la distance M cette année, ils ont fait une magnifique course tous les deux et sont repartis d’Embrun des étoiles pleins les yeux et ça c’est juste super.

Mon fidèle compagnon d’entraînement, le bien nommé Vince. Un grand champion d’athlétisme, lui a dit un jour, ton marathon à Verone, tu connaitras jamais pire… et moi, couillon que je suis, je lui ai dit, c’est que le début mon gars, bien sûr que tu connaitras pire, c’est sa 2ème fessée, il se construit un mental, et s'il persiste ça ne sera pas la dernière et je suis bien placé pour le dire, j’en ai pris un paquet des fessées ! Heureusement, il n’a pas abandonné, j’aurai eu plus de mal à le récupérer mentalement.

Merci aux différents entraineurs, même si je gère ma prépa moi-même (prof libéral oblige, j’ai horreur que l’on me commande), je prends les infos et je les adapte à ma sauce. J’apprécie autant l’aspect physique du triathlon que l’aspect cérébral des méthodes d’entraînements. j’aime comprendre ce que je fais et pourquoi je le fais.

Merci à tous mes sparring partners, je ne cite personne de peur d’en oublier mais ils se reconnaitront.

Du club, je pense avoir le moins l’esprit de compétition avec Isa, pour moi le sport c’est passion, bien être & santé (d’où ma question au Doc !) et surtout partage ! Mon chrono, je m’en cogne, je laisse ça aux champions, je suis finisher et c’est bien là l’essentiel. J’ai des critères de satisfactions qui sont un peu différent du commun des sportifs axés sur leurs performances, ma plus grande satisfaction sportive n’est pas sur une course, mais c’est celle d’aligner plus de 10000 km en CAP sur STRAVA sans blessure.

Jean Marc, que je considère comme l’un de mes modèles sportifs,  m’a dit « en 2017, t’as mis 17h, en 2018 tu viens de mettre 15h40, l’année prochaine, tu vas t’entrainer pour descendre sous les 15h… et tu mettras peut-être 19h…. Faudra pas le prendre comme un échec, finir Embrun, compte tenu de la difficulté de ce triathlon, ne pourra JAMAIS être considéré comme un échec ! ». Le 1er conseil pour le Round 3 est déjà donné ! J’ai pas encore décidé si je referai l’Embrunman, en tout cas, si je retourne au combat, une chose est sûr, ça ne sera pas seul, ça sera au moins avec le chti gars du Nord.

EmbrunMan 2018 en stats

  • Pré-requis :     triathlon (5ème année de pratique)
  • Embrunman2017, 5  triathlon Half ; 2 triathlon M
  • Natation : 5ème année de pratique, technique, technique et technique
  • CAP : (15ème année de pratique) entre 1600 à 1800km/an selon les années
  • 20 Marathons sur route
  • 1 Marathon trail (Mont Blanc)
  • Vélo (5ème année de pratique) : avec augmentation progressive du kilométrage d’une année sur l’autre de 2500km la 1ere année à 8000km cette année (j’espère!)
  • 4* l’etape du tour (2018, 2017,2016 et 2015) avec l’Izoard en 2017
  • Flèche Wallone
  • Mègeve Mont Blanc
  • Du 01 novembre au 31 décembre (Post Prépa): thèmatique : Explosivité et Vitesse
  • Nat : 2 séances/semaine Séances Club Technique dans les 4 nages
  • Vélo : 2 cycles de 3 semaines de PMA (Zone 5) sur Home Trainer
  • CAP : 2 cycles de 3 semaines de VMA
  • Du 1 janvier au 15 Aout : Thèmatique : Endurance, Endurance et…. Endurance

Natation : 123km (47h)

2 séances/semaine Séances Club (Technique Crawl et spécifique tri) + 1 séance perso ~3000m en refaisant les éducatifs de Christophe (Entraineur Nat’) mal assimilés, le reste souple et bien nager en pensant à chaque instant « derrière t’auras du vélo et de la CAP ».

Je n’ai jamais fais de fractionné, même sur les séances d’Olivier (entraineur Nat’), si j’ai bien retenu un truc après mon stage Natation à l’INSEP, c’est qu’on peut nager en 1’40/100m juste en étant propre techniquement, je considère que je n’ai pas encore le niveau technique pour fractionner, mais j’y travaille ! En descendant pour la 1er fois sous les 1h10 sur 3800m, je sais que ça va bientôt venir... ou pas.

Vélo : 5552km ; Dénivelé 43km (200h)

80 % en zone2 (Zone1 incluse), 15 % en zone 3 et 5 % en zone 4 dont 3 sorties de 160-180km ; l’une étant l’étape du tour Annecy-Grand Bornand (165km;3910mD+)

Application du « One Mile transition», le plus souvent possible en tenue de vélo et sans montre

CAP : 988km (93h)

80 % en EF incluant toujours au moins 1 côte (Noisiel, Villeflix etc.) pour habituer les jambes à la CAP de l’Embrunman ; 15 % AS42 ; 5 % autre allure pour casser la monotonie

Dont  5 sorties de +2h (une sortie par mois de Mars à Juillet)

10km de Vincennes en Février, 15km de Charenton et semi de Paris en Mars, aucune à fond, juste des points de contrôle pour le plaisir de courir avec les copains en donnant l’allure. L’Embrunman est une course égoïste qui ne tolère pas l’éparpillement….

Je suis obligé de vous dire que j’ai fais le Run & Canoë avec Tom (SCAB) au mois de Mai à Saumur sinon il va gueuler, séance clé dans ma prépa, en le supportant toute la course j’ai énormément travaillé mon mental.

  • Arrêt de la piste à partir de fin Mai.
  • Plus longue brick: 120km de vélo+25km de CAP
  • Stage triathlon à Majorque avec Baptiste (SCAB) en Février
  • Half de Barcelone en Mai (Parcours vélo vallonné) en prépa qui ne s’est pas passé comme prévu malheureusement. A choisir, je préfère la chute à Barcelone que sur l’Embrunman.
  • Soit 340h sur 33 semaines (10h20’/semaine) et minimum 60 h de piétinements par semaine (arf !)
  • Les zones correspondent à la table d’ESIE
  • A noter : je fais un CR commun NoisyTri et SCAB, d’où certaines précisions sur les individus cités de l’un ou l’autre club.

                                                                                                          Frédéric SECHET