Denis, la Marmotte Pyrénéenne

C’est par un beau week-end dans les Pyrénées à Luz Saint Sauveur que commence ce récit. Me voici dans un premier temps en mode supporter de Denis sur le Grand Raid des Pyrénées.

Prévu à 17h, je prends le temps de faire un ultra « mini » trail autour de la ville en attendant notre Marmotte Pyrénéenne. Au programme, pas moins de 220 kms à crapahuter dans les montagnes !
A 16h30, je consulte le tracker de la course qui m’indique que Denis est « estimé » à 20h à Luz Saint Sauveur. Il a pris un peu de retard sur ses prédictions et je me positionne à 19h30 au point de ravito pour être sûr de ne pas le louper. Je retrouve Sylvia en train de manger et on s’occupe en discutant. C’est que l’attente est longue et stressante. Il est habillé comment ? En vert. Ok. On scrute chaque concurrent au loin…

Un vert, un vert !
Ah merde, c’est pas lui… Là, là c’est lui et merde, c’est pas lui. 10, 20, 30 minutes et toujours pas de trace de notre marmotte verte. Si le concurrent se pose la question philosophique sur la course du « qu’est-ce que je fous là ! », le supporter s’en pose une autre « mais qu’est-ce qu’il fout, il devrait être là ! ». Travail de méninges… je chope le numéro d’un concurrent et je vois qu’il y a une bonne heure de différence entre le tracker et le passage des concurrents. Sylvia, t’excites pas il n’arrivera pas avant 21 h…

mais 21h passe et toujours pas de Denis, là, ça devient vraiment stressant. Enfin, Sylvia reçoit un message de Denis « Je suis dans la forêt mais d’après le point kilométrique je suis pas, loin mais je vois pas Luz !?! ». Ni une, ni deux, nous décidons de partir à sa rencontre jusqu’à la lisière de forêt où nous voyons de petites loupiotes descendre de la montagne.

J’en vois une, ça doit être lui ! Non, c’est pas lui. Et Enfin à 21h30, la délivrance, notre Denis surgit de l’obscurité. On est fou de joie, il ne s’est pas fait bouffer par un ours ! On prend des nouvelles, le physique est mort comme on peut s’en douter après 170 bornes mais le moral est bon. Pas de problème de déshydratation, de digestion et pas de douleurs aux pieds. On descend avec lui vers le point de ravito, vous emballez pas, on a
fait 1 km avec lui sur du bitume !

Les ravitos en ultra trail, c’est un peu spécial, ce n’est pas hyper rapide, certains en profitent pour faire des micro siestes et d’autres pour se reposer mais Denis n’a pas envie de dormir. On essaye de lui faciliter son ravito. Je l’oblige à boire car je vois qu’il n’est pas très lucide, à manger aussi. Le gros problème sur l’ultra trail, c’est les pieds, forcément ils prennent cher ! Je défais les chaussures et les chaussettes de Denis, retire tous ses pansements, trop éclaté pour le faire lui-même. Faute de pouvoir prendre une douche, il
va au moins se rafraîchir et nettoyer ses pieds au jet. Je prends soin de bien lui essuyer les pieds pour éviter une catastrophe avant que Sylvia entame son travail de momification des pieds. Pansements seconde peau et straps sur tous les points de friction du pied, la boîte de pansements y passe. Tu m’étonnes que sa 2ème paire de pompes soit trop petite avec toutes ces couches. Je laisse Sylvia dans ses œuvres et oblige Denis à boire et à
manger.

Alors que je vais lui chercher du riz au lait, j’assiste à une scène amusante…. Les débriefeurs de courses qui sont encore sur la course. Y a des mecs qui débriefent de leur course alors qu’ils sont encore dedans ! l’un « la descente sur Luz, elle est vachement technique », l’autre « mais nan, elle est facile ». Les mecs sont aussi éclatés l’un que l’autre et trouvent la force de s’embrouiller sur la difficulté du parcours tels 2 ivrognes qui débattent du G7. t’as juste envie de leur dire… et oh les gars ! Votre course elle n’est pas finie ! Vous débrieferez à l’arrivée! Vous me connaissez comme je suis taquin pour observer les travers des sportifs…

c’est un phénomène spécifique aux courses longues distances puisque je l’avais déjà observé en supportant Vince sur l’Alpsman et Abdel, Jim, Olivier et Patrick sur l’Embrunman (des mecs sur la partie course à pied qui débriefent de la partie vélo et de la difficulté de l’Izoard !). C’est la spécificité des courses longues distances, il y a toujours des débriefeurs de course pendant la course ! Et à chaque fois ça me fait beaucoup rire, finis ta course couillon, tu débrieferas après !

Sylvia a fini son travail de momification des pieds et Denis est prêt à repartir. Je l’accompagne dans la nuit au travers de Luz jusqu’à l’embranchement qui le fait repartir dans la montagne. M’assure une dernière fois que les points qui peuvent être source d’abandon sont ok : hydratation ok ! Alimentation ok ! Et tes pansements aux pieds, ils ne
te gênent pas ? Ok….

Je laisse notre marmotte s’enfoncer dans la montagne et entamer sa 2ème nuit de course, le physique est mort mais le regard est déterminé à finir….

23 h, il est temps d’aller se coucher.
Le lendemain, inquiétude, pas de nouvelles de Denis… placé en terrasse, je vois des mecs qui suivent la course, je leur explique que je n’ai pas de nouvelles. Normal, le tracker déconne ! Les 3 derniers points de contrôle ne s’affichent pas !
Pour m’occuper, je consulte Strava, j’aime bien regarder les séances de CAP de rentrée. Il y a ce que tu veux faire et ce que tu fais…Je vais sur le compte de Morgan pour voir comment se passe sa prépa marathon et je vois

« 2*15’AS42 + 10’AS42 »

compte Strava de Morgan

et je me marre intérieurement, ça sent quand même bon le 3*15’AS42 foiré !
Nouvelle de Sylvia qui l’attend à l’arrivée. Arrivée estimée à 11 h, il arrivera enfin en milieu d’après-midi.

Finisher le Denis ! RESPECT

Pour ma part, je ferai la Marmotte Pyrénées le dimanche. Des décors somptueux et sauvages qui m’ont fait découvrir une magnifique région ! Sur le plan sportif, dans une course, les plus encouragés se sont toujours les premiers et les derniers, disons que j’ai été beaucoup encouragé !

Le retour en bagnole pour les Pyrénées, c’est quand même 8 heures ! J’échangerai bien 8 heures de bagnole contre 10 heures de vélo. Alors que je suis pris dans les bouchons, je décide de m’occuper et demande à ma nouvelle voiture connectée si je peux envoyer un kudo à Denis sur strava pour le féliciter de sa course et vous savez ce qu’elle me répond….

« Je ne peux pas faire cela, la conduite nécessite toute votre attention ! »

La voiture de Fred

Denis, je te laisse voir avec ma bagnole !
En tout cas, ma voiture connectée peut faire beaucoup de choses…. Mais elle ne pourra jamais écrire à ma place…
Par amitié pour Bruno…

Fred Sechet